La course terminée il faut admirer le mano a mano offert par le duo de tête, Maxime et Benoît dans cet ordre à l’arrivée. Ils ont mis l’intensité qu’il fallait en début de course pour créer la différence. J’adresse aussi un très grand bravo à tous les finishers, et plus largement à tous les participants. Chacun a donné le meilleur de lui-même.
Vouloir boucler et vouloir finir bien placé induisent des stratégies et des décisions bien différentes. C’est le même phénomène qui se produit dans les courses de vitesse. Pour me libérer de cette alternative je n’ai jamais regardé le classement, seule ma course m’intéressait. Peut-être que les infos entendues sur le déroulé de la course ont eu une influence sur mon comportement ou mon moral.
Depuis le troisième jour de course je navigue entre frustration et déception. L’importance d’une heure d’écart sur le plan de marche prévu chamboule tout. La fatigue altère le jugement et exacerbe les émotions. Le sentiment s’installe, comme dans les dernières coupes du monde au Mexique et en Italie, d’être si proche de la réussite et pourtant de ne récolter que de la désillusion. L’impression s’ancre dans ma tête d’être dans le juste dans mes analyses et mes décisions, et pourtant d’avoir faux dans mes actions.
Dans ce type de course, j’ai aussi mesuré l’épaisseur de la différence entre un choix gagnant et une décision débile, pouvant mener à mettre en cause ton intégrité physique ou la confiance de ton assistant(e) dans ton intelligence. Cette épaisseur est de l’ordre du diamètre d’une suspente de stabilo. C’est assez fin. C’est l’épaisseur d’une fêlure dans ma certitude de savoir gérer ma sécurité qui m’a atteint dans les heures qui ont suivi l’épisode de mon décollage raté au Moucherotte et ne m’a pas permis de voler le lendemain.
J’ai beaucoup essayé, j’ai toujours privilégié les plans vol. Je n’ai pas une grande vitesse au sol, 3 à 4 km/h sur les chemins, 5 à 6 sur le bitume que j’ai évité autant que faire se peut, 500 à 600 m/h pour le dénivelé positif. Au niveau endurance et résistance j’ai plutôt bien tenu, la carcasse est encore bonne. Je ressens plus de la lassitude que de la fatigue 48 heures plus tard. Peut-être aurais-je pu et dû me mettre un peu plus dans le rouge. Mais pas sûr!
À un moment de mon histoire personnelle dans le parapente j’ai ressenti un manque de reconnaissance de ce que je produisais. Aujourd’hui je m’en fiche. En revanche j’aurais grandement eu besoin de plus de reconnaissance du terrain, ou bien de plus de pratique dans les secteurs survolés. Je n’avais pas envisagé les faces Ouest pour descendre le Vercors dans ma préparation. Pourtant cela aurait pu payer, une heure plus tôt, une heure à chercher une aire d’envol.
La question « alors tu le referas? » n’a pas encore de réponse. J’ai bien envie de terminer ce que j’ai commencé. J’ai fait une belle découverte, bien plus riche que les épreuves de sprint. Pourtant il faudra certainement que je trouve un moyen d’améliorer ma vitesse au sol si bien figurer est un objectif. Je n’ai pas vraiment l’impression de mériter les généreux et nombreux messages de félicitations que nous avons reçus. Peut-être faudra-t-il y retourner pour m’en sentir digne.
J’ai beaucoup de monde à remercier pour cette aventure. Tout d’abord les organisateurs qui nous sont revenus en grande forme après une année de break. Ensuite les copains qui m’ont aidé à préparer le parcours puis ont relayé les infos météo: Charles, Jacques, Jean-Ba, Jean-Mi, Lolo… Je remercie toute la Nature rencontrée au cours de ce voyage: les paysages, les chamois, les bambis, les marmottes que j’envie, les rapaces que j’admire, les escargots et les limaces avec qui je me suis trouvé des affinités, le soleil, les nuages avec lesquels j’aime fleurter… Tout sauf le vent qui m’a pourri la vie. Bien sûr la famille Genovese pour son soutien inconditionnel, le bus de Marc et Yvonne, l’atelier couture de Marc, la navigation de Mélanie, la colocation de Marlène… Tous les supporters enthousiastes, ils se reconnaîtront, de la part de chacun le soutien et les messages d’encouragement ont été précieux. Ce n’est pas une aventure solitaire. Car reste l’alter ego du binôme dans cette histoire. Elle sait tout faire et supporte beaucoup, elle est indispensable pour me donner l’envie et les moyens de vivre ces moments uniques. Elle est aussi unique et s’appelle Laurie. Merci à toi.
Et nous, en tout cas moi ;-), je vous dis MERCI à vous deux !