En ce jour de fête nationale, le traditionnel 14 juillet, avec son défilé militaire devant les corps constitués et ses remises de médailles aux champions sportifs, voici une question qui aurait pu être posée lors des récentes épreuves de philosophie du bac, voire en contrôle continu de BP-JEPS. Je n’ai pas planché 4 heures sur le sujet, je vous livre simplement quelques réflexions articulées autour de la devise de notre république: liberté, égalité, fraternité.
Liberté
Le sport de haut niveau est-il l’expression de la liberté? Vous voulez accéder au haut-niveau, alors pratiquez plus, entrainez-vous plus, sacrifiez les vacances, les week-end. Certains lâcheront les études, d’autres leur boulot. Bientôt vous fréquenterez règlement, fédération, entraineur, parrains, média, et vous connaitrez nombre de contraintes nouvelles. Votre communication changera pour le discours bisounours de circonstance, vous mettrez votre mouchoir sur vos idéaux. Alors non, le sport de haut niveau n’est pas républicain.
Égalité
Le sport de haut niveau est-il égalitaire? La compétition à haut-niveau est l’expression même de l’élitisme, de la performance, de la sélection, de la magnification des aptitudes naturelles, ou pas. Vous avez les bons résultats, il vous faut le bon matériel. Vous avez le matériel, il vous faut l’expérience. Vous avez l’expérience, il vous faut les moyens financiers. Vous avez les moyens financiers, il vous faut être dans les petits papiers des bonnes personnes. Vous avez… toujours un truc en moins que les autres. C’est une course à l’échalote de l’avantage personnel. Alors non, le sport de haut niveau n’est pas républicain.
Fraternité
Le sport de haut niveau est-il fraternel? Eh oh! Toujours en train de planer au royaume de Morphée? Le haut-niveau c’est la confrontation permanente. Vous progressez, il faut faire encore mieux que vos rivaux. Vous êtes au top, il faut défendre vos titres et votre légende. Les flancs de la pyramide sont raides et glissants. Dur de monter, facile de descendre, peu de place en haut. Quel serait donc votre intérêt de vous intéresser, ou pire, d’aider un de vos concurrents? Alors non, le sport de haut niveau n’est pas républicain.
Libre, équitable, fraternel et impérial!
Ouh là mais que m’arrive-t-il, moi d’habitude si gai, si positif? Pas d’inquiétude à vous faire, juste l’occasion de vous donner quelques clés provocatrices pour vous aider à mieux lire les nouvelles sportives! Ce sont vos valeurs et votre personnalité qui vous guideront sur le chemin du niveau, lequel ne sera qu’un révélateur de vous-même et de notre société.
Je ne me sens jamais aussi libre que lorsque je vole. L’équité, plus que l’égalité, est une préoccupation éthique qui m’habite. Côté fraternité, le monde du vol libre m’a permis de faire de nombreuses rencontres, de savoir sur qui je pouvais compter et ceux-là peuvent compter sur moi. Alors oui, la progression vers le haut niveau de notre discipline m’a aidé à m’épanouir.
Quant à mon côté républicain, je ne m’épancherai pas, Anakin risquerait de ressortir de sa boîte!
je deviens fan de ton blog, je l’apprécie de plus en plus, continue comme ça 😉
Pas tout à fait d’accord avec ta conception de la liberté et de la fraternité, même si sur l’égalité je te rejoins.
Liberté: le choix de s’engager, de faire ces sacrifices, reste libre. La liberté ce n’est pas juste avoir son dimanche de libre, si tu veux être dans le haut niveau, c’est un choix que tu fais, et les conséquences de ce choix font partie du deal. Quant à la communication de bisounours, elle semble plus (vue de l’extérieur, hein, je peux me fourvoyer) liée à l’écosystème financier, pas nécessairement à la performance. Les sports « confidentiels » n’en sont pas nécéssairement atteints par exemple. Et même dans les sports hautement médiatiques, i.e. le rugby avec les saillies de Chabal, Boudjelal, etc…
Fraternité: on voit encore des sports où la fraternité (parce que peu d’enjeu financier/prize money, et que le sponsoring reste léger) peut-être réelle. Exemple de l’ultra où des coureurs s’entraident pour arriver au bout ensemble: Lorblanchet/Breuil 2èmes main dans la main aux templiers 2011, plus récemment Lanne et d’Haene gagnant ensemble les 80km du mont blanc. On a vu cet hiver cette image en cross d’un coureur qui a refusé de franchir la ligne en vainqueur parce que le leader s’était arrêté 20m avant, pensant (un peu sonné par l’effort) avoir terminé… et ça ne veut pas dire qu’ils ne vont pas s’arracher pour gagner seul la fois suivante. Ca veut juste dire que dans certains contexte, la fraternité reste une arme pour la performance.
Alors non, ce n’est pas courant, mais si on part défaitiste ça va pas aider à entretenir l’idée d’un sport où le haut niveau peut rimer avec plaisir.
Bref je suis d’accord avec ton analyse là où l’argent joue un rôle prépondérant, et où l’instinct de survie prime, mais sur les sports moins médiatiques cela semble (parfois) être moins le cas. Haut niveau vs. professionalisme, peut-être?
Merci Jean-Marc, hello François!
Ah! J’adore ce positivisme teinté d’une pointe de polémique, et vice-versa!
Ma conception de la liberté et de la fraternité? Tiens, les aurais-je données? Peut-être un peu, à la fin, après la provoc’… ou peut-être ai-je perdu du monde en route.
Beaux sujets de philo pour une prochaine fois: qu’est-ce que la liberté, quelle est votre conception de la fraternité? Je garde l’idée en stock.
je faisais évidemment référence à ton approche devise comme définition du « républicanisme » vs. sport de haut niveau, et non pas à ta conception de la liberté au sens général… Je suis désolé d’avoir pu te laisser penser le contraire. Mais j’ai quand même cru lire que pour toi le sport de haut niveau, imposant « fédération, entraineur, parrains, média, et […] contraintes nouvelles » était en opposition avec la liberté? J’ai du mal comprendre.
Et chaque opinion est digne d’intéret, on n’est jamais obligé d’être toujours d’accord ou toujours en opposition 🙂 En tout cas je me suis (cette fois seulement) donné cette liberté 😛
Pas de souci!