Escaladez la pyramide

Vous avez aimé le SWOT, une méthode dérivée du marketing adaptée au parapente? En voici une seconde: la pyramide de Maslow! C’est une théorie assez basique pour expliquer les comportements et les motivations des individus, un enseignement de base en cours de marketing et management pour positionner un produit ou un entretien. J’ai toujours eu un peu de mal à l’accepter telle quelle, surtout sur son aspect hiérarchique, mais elle a le mérite comme toutes les bonnes théories de rendre compte de la réalité d’une manière compréhensible et surtout qui permet de prendre des décisions. La pyramide comporte 5 niveaux de besoins. Un niveau de besoin ne peut être satisfait que si les besoins de niveau inférieur sont pleinement satisfaits. Donc l’idée c’est qu’il faut escalader la pyramide genre Saqqara, marche après marche.

Besoins physiologiques

Disponible dans le rayon: dormir, manger, boire, pipi, popo… La pyramide serait-elle mise sur la pointe dès le premier niveau? Car combien de pilotes sont prêts à mal satisfaire ces besoins physiologiques pour assouvir leur envie de voler? Mais, mais, mais, peut-être auraient-ils tort? Et oui, s’hydrater, s’alimenter, avant pendant et après la manche, faire son pissou et brancher la durite, bref c’est le truc de base, celui qui se rate ici risque fort de ne pas monter bien haut.

Besoins de sécurité

Les besoins physiologiques satisfaits, nous passons au tiroir supérieur: tout ce qui concerne la sécurité, physique, psychologique, financière, sociale… Nous n’avons toujours pas décollé et nous parlons déjà de sécurité. C’est plutôt bien comme démarche, non? Et pas uniquement de sécurité passive ou active, EN966 et épaisseur de mousse-bag, non. Nous parlons aussi d’avoir évacué ses problèmes de boulot, de banquier, de médecin et j’en passe avant d’ouvrir le sac.

Autres exemples pour les hommes volants:

  • Cela peut vouloir dire se poser quand les conditions sont pourries, car notre survie est plus importante que notre envie de gagner, ou simplement de voler.
  • Par antinomie à la sécurité, la prise de risque serait possible et même nécessaire pour revenir à un besoin physiologique. Je crois que cela ne marche pas comme cela pour nous. Comme je vous le disais, parfois la théorie est un peu percée. A moins que vous ne nous trouviez la bonne illustration!

Besoins d’appartenance

Nouvelle étrangeté de la théorie, alors que je place le vol dans les 2 catégories supérieures, la question de la relation sociale vient immédiatement après le niveau de la sécurité. Et tant qu’homme, si ma sécurité est assurée, je vais alors me préoccuper de mon insertion sociale. Pourquoi pas, l’être humain est social par essence, parait-il. Nous allons donc souhaiter avoir des amis, des relations, nous rapprocher de ces drôles d’hommes volants, de cette caste des pilotes, faire partie d’un club, d’un groupe,

  • En y réfléchissant 2 secondes la compétition implique forcément un rapport aux autres. Et faire de la compétition apporte une satisfaction en soi, même pour celui qui ne cherche pas le podium, même pour celui qui ne cherche pas réellement à progresser. Il trouve son plaisir dans le groupe, le transport en commun, le petit déjeuner offert le matin et la bière collective après le posé. Mais il ne tardera tout de même pas à passer au niveau du dessus, j’en suis convaincu!
  • Corolaire évident: il ne faut pas sacrifier sa sécurité pour briller en public! Les waggas c’est bien quand on les fait pour son plaisir, et cela relève des niveaux supérieurs, on ne les fait pas pour épater ses petits camarades ou la blonde de passage.

Besoin de reconnaissance

Forts de l’intégration sociale qui nous est acquise, nous allons vouloir exister, pour notre estime personnelle comme au yeux des autres. Clairement nous sommes maintenant au bar autour d’un verre vers 18 heures, après un vol d’au moins 100km avec 3 points bas de fou et un thermique de malade qui nous a sauvé l’affaire alors que… Le pilote se la raconte et la raconte aussi aux autres. Il évacue, il verbalise certes, mais il cherche à combler son besoin de valorisation. Il se sent alors plus fort, mieux dans sa peau, mieux inséré dans son groupe.

  • Bien entendu la compétition permet d’obtenir ce genre de satisfaction encore plus nettement, car mesurée, chronométrie, et qui plus est avec encore plus de publicité. Nous y sommes!
  • A contrario la voie vers l’accomplissement ne passe pas par la critique ou l’exclusion du groupe, sinon on sabote l’étage du dessous et on dégringole de l’échafaudage.

Besoin de réalisation

Nous touchons au but! Il est toujours question d’exister, mais d’exister maintenant en tant qu’être humain. Tel le petit scarabée qui cherche sa voie (il y a longtemps que je ne l’avais pas sortie celle-là) nous devenons citoyen du monde, nous avons envie de nous réaliser, construire notre âme, nous souhaitons partager pour progresser dans notre voie personnelle et faire progresser les autres, nous touchons au spirituel. Comme qui dirait la performance ce n’est pas de se battre contre les autres, c’est de donner le meilleur de soi-même (promis je ne vous ressors pas toutes mes expressions fétiches).

  • Certains peuvent sacrifier la morale pour le résultat, croyant obtenir de la reconnaissance par la seule gagne, ou de la sécurité financière par du prize-money. Il leur suffit effectivement de redescendre d’une à trois marches et de renoncer à leur nirvana.
  • Sans aller jusqu’au mauvais karma, un pilote peut et doit parfois sacrifier la manière pour le résultat, renoncer au panache et au plaisir du vol solitaire pour l’efficacité: les bons pilotes sont mes amis, le groupe est le plus fort…

Voila pour la pyramide de Maslow. Je ne me suis pas trop impliqué dans cet exposé mais je me retrouve bien à tous les étages. Je sais assez clairement ce que je suis prêt à engager et ce à quoi je ne renoncerai pas. A vous de trouver sur quelle marche vous êtes assis, et interro écrite la semaine prochaine!

11 réflexions sur « Escaladez la pyramide »

  1. whaoo, je ne regrette pas de m’être abonné à ce fameux blog ! t’en fait des comme ça chaque semaine ?
    Pas sûr d’avoir tout compris mais l’impression nette de me retrouver aussi dans certaines de tes alusions sur les trois niveaux supérieurs.

    Il est certain que la satisfaction du pilote passe par des voies plus complexes que le simple fait de gagner ou non. J’ai cru remarquer qu’en vol de distance, la notion de relation aux autres, l’attention portée aux regards des autres est plutôt une faiblesse objective, d’un point de vue purement sportif.

    Mais qui aimerait être un robot, machine-à-gagner, froid, solitaire, calculateur et impénétrable ? à quoi bon si la joie n’y est pas ?
    Ce qui nous attire davantage, c’est la victoire associée à la notion d’équipe, de complicité, de bravoure, de partage, de joie.

    Dans un bon podium, il y a des enfants heureux qui s’amusent entre eux à s’asperger de champagne.

  2. LOL aller manque plus qu’une matrice BCG, les 7S, et ce sera du parapente en entreprise ! Je charie… :))
    Rigolos et originaux ces billets !

  3. yes, ça c’est de l’apport!
    mais j’ai rien pigé à ‘Par antinomie à la sécurité, la prise de risque serait possible et même nécessaire pour revenir à un besoin physiologique.’
    La prise de risque comme besoin physiologique? J’ai beau tourner la phrase dans tous les sens, je n’y arrive pô. 🙁
    Martin rigole, mais je crois que le monde de l’entreprise peut nous apporter beaucoup dans notre pratique et notre rapport à celle-ci, pour un peu qu’on se pose les bonnes questions.

  4. J’essaye de traduire alors:

    – L’aspect hiérarchique de la théorie dit que tu ne peux satisfaire un besoin de niveau n que si les besoins de niveau inférieur, n-1, n-2… sont pleinement satisfaits.

    – Donc si tu as besoin de satisfaire un besoin du niveau physiologique, tu peux et dois même renoncer aux besoins du niveau sécurité.

    – Car si les besoins de niveau physiologique ne sont pas satisfaits, tu ne pourras satisfaire les besoins de niveau sécurité.

    – Ce faisant, renonçant temporairement à la sécurité pour assouvir un besoin physiologique, tu es amené à prendre des risques (vu que tu renonces à la sécurité).

    CQFD?

  5. Hello.
    Ou là… Maslow ! Les années 50 si je ne m’abuse… Il est certain que c’est plutôt bancale comme modélisation. Dans le monde de l’entreprise, je ne sais pas mais dans le champ sportif c’est un classique que les profs ont le mauvais goût de présenter à peu près systématiquement lorsqu’il s’agit d’aborder les problématiques se rapportant à la Motivation… (Ce sont de vieux profs…)

    Mais c’est vraiment aussi poussiéreux que le coup de l’expectation-valence par Atkinson (57) ou que les indéboulonnables motivations "extrinsèques" / "intrinsèques"… (par je ne sais plus qui tellement c’est vide et manichéen). Le truc en vogue en ce moment (Je veux dire depuis 20 ans) c’est plutôt le continuum d’auto-détermination par extension des conclusions de Deci et Ryan et je trouve le modèle bien plus fin, et plus précis… Et donc pour Pierre c’est probablement encore plus chiant (et il n’a pas tout a fait tort).

    Sinon j’ai googlé les 7S de Mc Kinsey… (Marrant !)
    Voyons le BCG ?!
    @+ Max.

  6. Franchement j avais jamais vu de texte aussi compliqué sur ce blog, je vai finir par allé voir ailleur….

    @+

  7. On se marre bien, hein? Remarquez ça tombe bien je fais ça pour m’amuser. Parce que les bonnes théories de la motivation, elles n’existent pas. Heureusement il nous reste du bon sens, n’est-ce pas?

    Franchement, le BCG ne m’inspire pas (OK je fais la star, notez que pour les boulets j’ai des idées, qui fait la vache à lait et le dilemme?). J’avais pensé aux 4P mais c’est limité. Les 7S c’est trop long et ça ne marche pas trop pour un individu. Non, non, je crois que je vais rester sur mon idée de Porter pour ce week-end!

  8. Cet article est vraiment bon. L’analyse des différents travaux effectués par l’auteur est très pertinente et le panorama des théories motivationnelles est assez exhaustif. On voit que tu bosses et je ne sais toujours pas où tu trouves le temps.

    Merci pour la lecture. ++

  9. j’ai compris ta phrase, merci Maxime. 🙂
    C’est prise de tête, mais franchement intéressant pour quelqu’un qui veut faire autre chose que voler avec ses fesses… bien que ce soit important, le c.. 😀

  10. Et le " besoin" de comprendre ? 🙂

    C’est bien de discuter de l’utilité de la pyramide des besoins de Maslow, mais ne serait-ce pas mieux d’y mettre un peu plus de pertinence critique.
    Pour faire court, bien que pragmatique, Maslow ( 1943 ) confond dans sa théorie sur sa pyramide des besoins, les besoins qui sont des manifestations de sensibilités internes, qui expriment des carences organiques se manifestant par des tensions dont leur réduction est indispensable au maintien des conditions de vie d’un organisme.
    En gros, ils concernent stricto sensu, nos besoins physiologiques, par exemple: respiration , défécation miction, alimentation, sommeil… La satisfaction de ces besoins primordiaux impérative la réduction de ces tensions physiologiques indispensables au maintien de la vie.
    Maslow confond donc dans les niveaux supérieurs de sa pyramide, des "besoins" irrépressibles et les désirs modulables à loisir, laissant une large part de détermination à la volonté.

    Confondre besoins et désirs donne dans la confusion, en laissant croire que les désirs doivent être satisfaits culturellement comme des besoins fondamentaux. Les équivoques dans les termes ont des incidences directes sur le comportement revendicatif individuel ou social, s’exprimant dans les relations interpersonnelles.

    Les décisions dépendent du degré d’urgence ou d’importance auquel nous sommes confrontés et celui-ci s’exprime dans les termes que nous employons. Autant, sans être un acribologue obsessionnel, faire attention de manière critique aux concepts que nous véhiculons sans trop y réfléchir.
    Tranquillisez-vous, ce qui vaut pour vous, vaut également pour moi, car la vigilance et l’intelligence ne sont pas des fonctions infaillibles.

    Cordialement

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