Théorie du contrôle: introduction

Au cours d’une discussion d’entraineurs l’hiver dernier, Julien nous a décrit la notion de contrôle qu’il développe auprès des pilotes du Pôle Espoir. Il a présenté une équation censée définir le contrôle. Elle m’a intrigué et ne me semblait pas refléter toutes les situations possibles. En revanche l’effort de formalisation mathématique de ce problème m’a paru être une démarche puissante et louable qui devait être approfondie.

Je recycle et isole ici une série d’articles qui étaient noyés dans le récit d’une pluvieuse épreuve en Italie au mois de juin dernier. De plus Julien m’a transmis le texte de l’étude développée au sein du Pôle Espoir. Ce sera le dernier billet de la série, en fin de semaine. Accrochez-vous, c’est parti!

Théorie du contrôle: introduction

Imaginons deux pilotes en vol. Le pilote A est plus haut que le pilote B. Le pilote B est plus avancé sur le parcours que le pilote A. Qui contrôle qui? Quelles sont les variables qui interviennent dans la détermination de ce contrôle? Cette série d’articles apporte des éléments théoriques pour répondre à ces questions.

Si je suis le pilote A, en fonction de la différence d’altitude qui me sépare du pilote B, je vais lui laisser prendre un peu d’avance sur le parcours. Suffisamment pour le laisser prospecter à ma place mais pas trop pour rester au-dessus de lui et en capacité de boucler devant lui. En faisant le rapport de cet écart de distance à cet écart de hauteur, nous obtenons une finesse. Elle est souvent improprement appelée angle de contrôle.

Nos deux pilotes A et B cherchent à atteindre un point G. Nous prendrons pour hypothèse que, vus de l’espace, les pilotes A et B et le point G sont alignés. Nous supposerons que B est plus proche de G alors que A est plus haut que B. Tout ceci est illustré dans le dessin qui précède. L’altitude de G dépend de paramètres tels que les positions initiales respectives de A et B, leur comportement en vol, les Vz du jour. Disons qu’en fonction de ces conditions, G définit la frontière entre la zone contrôlée par A de celle contrôlée par B. Autre hypothèse forte, nos pilotes évoluent dans une masse d’air neutre (entre les thermiques): pas de vent, pas de subsidence ou restitution, pas d’appui dynamique, nada. Nous prendrons parfois pour hypothèse que nos pilotes ont un comportement rationnel, mais pas toujours, cela reste du parapente.

Nous affirmons que A contrôle B s’il peut arriver au point G ou au-dessus du point G avant son camarade:

  • A proximité immédiate de B en allant dans la direction de G, A ne contrôle pas grand-chose à moins d’être vraiment plus haut que B et que celui-ci ne trouve pas de fort thermique.
  • Au loin, si B ne rencontre aucun thermique, il va finir par terre. Au-dessus et au-delà de ce point, A peut arriver tranquillement et exercer un contrôle absolu.
  • Entre ces deux points, à savoir la position de B et la position du final de son plané, l’altitude du point G qui permet à A d’exercer son contrôle va progressivement baisser. Cette altitude dépend des conditions initiales dD et dH ainsi que de Vzmc, Va, Vb (si B n’est pas rationnel) et bien entendu D.

Avant de généraliser le problème et sa théorie, étudions ses conditions aux limites dans deux cas particuliers. Dans toutes les équations j’utilise des égalités pour déterminer le point d’équilibre. En pratique il faut les comprendre comme des « inférieur à » lorsque nous considérons la finesse de contrôle : pour que le pilote A contrôle B, A doit voir B avec une finesse inférieure à celle déterminée par les équations d’équilibre.

Les variables de notre problème sont les suivantes:

  • dH est la différence d’altitude entre A et B
  • dD est la différence d’abscisse entre A et B
  • H est l’altitude que A va perdre
  • D est la distance que A va parcourir
  • Va est la vitesse horizontale du pilote A
  • Vb est la vitesse horizontale du pilote B
  • Vmax est la vitesse horizontale maximum
  • Vmc est la vitesse horizontale McCready
  • Vza est le taux de chute du pilote A en transition
  • Vzb est le taux de chute du pilote B en transition
  • Vzmc est le taux de montée espéré
  • Fa est la finesse en transition du pilote A
  • Fb est la finesse en transition du pilote B
  • Fmc est la finesse en transition à vitesse McCready
  • Fvmax est la finesse à vitesse maximum

Toutes les valeurs sont positives. Le taux de chute en transition est positif, le taux de montée en thermique est positif. Et ce que nous cherchons à déterminer est :

  • Fc est la finesse de contrôle, égale au rapport dD / dH